28 novembre : La Quiaca - Tilcara (200 km)

Une fois n’est pas coutume, commençons par la fin !

Arrivés à Tilcara à la mi-journée, nous nous dirigeons avec une certaine dose de philosophie, ou de fatalisme, voire même d'appréhension, vers notre réservation de logement pour cette nuit… Et là, passé une entrée quelconque, une cour poussiéreuse et deux chiens jaunes en pleine sieste, nous tombons sur... un p’tit coin d’paradis ! Une grande chambre, propre, claire et sobre, ‘avé le balcon’ et entourée de faux-poivriers, ainsi nommé par ses grappes de petites graines rondes et rouges qui rappellent le vrai poivre, un des arbres les plus communs au Maroc, sur lesquels nous grimpions en nous poissant les doigts…

Après installation et une ‘siestita’ nous partons à la découverte de la petite ville (6000 hab), puis de son site archéologique mondialement connu, la Pucara de Tilcara, une forteresse-citadelle pré-inca en partie restaurée dans les années 1950 et qui occupe un promontoire face à la Quebrada.

Parenthèse sur la Quebrada. Signifie littéralement « cassée » et désigne en fait toute la vallée sud-nord entre Jujuy et Humahuaca qui, non seulement constitue une sorte de faille en rupture de la puna (l’altiplano argentin), mais se trouve elle-même sérieusement « cassée » par la forte érosion, montrant ainsi des formes et des couleurs incroyables.

Puis re-sieste… car ici, c’est pire qu'en Espagne : tout ferme de 14h à 17h, voire 17h30, et comme nous avons l’intention de manger de la viande (la 1^ère fois était à Brasilia…), nous attendons les 20h.

Mais des choses se sont passées depuis ce matin ! D’abord réveil à 7h, soit après 10h de sommeil. Petit déjeuner quasi européen, horaires d'activité espagnols, on sent bien qu’on a quitté les pays andins et qu’on est davantage en pays de forte colonisation où les colonisateurs, de par leur nombre, ont importé, et imposé, beaucoup de choses, à commencer par le rythme de vie. Autre différence : le temps, beaucoup de nuages, fort vent frais l’après midi.

Vers 9h30 au Terminal, nous trouvons instantanément un bus ‘touristico’ (2 étages, sièges inclinables, air con, toilette à bord) pour Tilcara, et nous roulons pendant près de 2 heures (135 km) sur la poursuite argentine de l’altiplano, la ‘puna’, à 3600-3700m d’altitude. Nous qui espérions une descente quasi immédiate de 1000m,… Mais cette énorme plaine, bordée de montagnes de part et d’autre, beaucoup plus fertile qu’au nord à en juger par les nombreux enclos à llamas et alpagas sur herbe rase mais souvent verte (signe qu’il a plu), est d’une grande beauté.

A peu près à la mi-chemin, la plaine se rétrécit progressivement en vallée, et à partir de Humahuaca ça commence à se ‘québrader’ sec ! Erosion, couleurs des roches, plissements étranges (arrondis, en demi-cercles de plus en plus larges,…). Et surtout, milliers de cactus (euphorbes candélabres), tous plus photogéniques les uns que les autres…mais pas en bus !

Notre jeune voisin, un immigrant bolivien clandestin (« yo he perdido mis documentos en La Quiaca »…) mâche des feuilles de coca, et m’en donne quand je tends la main (il faut les macher, puis les garder en boule dans la joue une 1/2 heure avant de les cracher).

La vallée devient plus étroite, plus riche : nous traversons le Tropique du Capricorne, et nous voici à Tilcara.