27 novembre : Uyuni - Villazon (280 km en train)
Ca commence par un ‘réveil’ à 1h30. Dans la rue, des chiens errants nous suivent jusqu'au ‘club’ qui déverse sa ‘musique’ dans tout le quartier, puis c’est la Plaza de Armas et l’Avenue Ferroviaria. Nous voici à la gare à 1h50. Trois pelés et deux tondus. L’employé de la bolleteria s'étire, regarde notre réservation sur notre téléphone, finit par nous trouver sur son écran, et nous imprime nos billets. Nous entrons dans la salle d’attente où une vingtaine de voyageurs somnolent, qui assis, qui couchés par terre sur des couvertures. Le train est attendu à 2h35, en avance sur l’horaire (!), mais n’atteindrait Villazon qu’a ‘las doce del mediodia’, soit après une dizaine d’heures… De fait, il ne partira d’ici réellement qu'à 2h50… Nous qui trouvons que 5h de TGV entre Tarbes et Paris c’est long… M’enfin, nous sommes assis, et aux mêmes places, confortables, que l’autre jour. Toujours aussi étrange, et réjouissant, de constater que ces endroits, ces moyens de transport, ces horaires, tout ce qui n'était que des idées, des points sur des cartes ou des chiffres sur des écrans, tout d’un coup deviennent réels, concrets, s’animent, prennent vie...
Chauffage, couvertures, oreiller,… vraiment c’est le grand confort. Le seul problème reste les rails qui font trembler et tanguer ce pauvre train et nous secouent comme des pruniers. Et limitent sa ‘vitesse’ à… 28 km/h en moyenne (280 km
en 10 heures).
Nous parvenons à fermer les yeux quelques quarts d’heure, mais voilà déjà l’aube et le premier arrêt : Atocha, ville minière à en juger par sa situation dans une gorge, et aussi les deux grandes statues polychromes sur le quai de gare évoquant
la mine et les mineurs. C’est que toute cette zone d’Oruro, Uyuni, Atocha, et meme Tupiza qui sera notre prochain arret, se trouvent dans la grande région minière de Potosi, le fameux San Luis Potosi aux énormes mines d’argent, un peu plus à l’est de notre
route.
6h, le soleil est bien levé et éclaire un paysage de steppe sableuse, à l’herbe rare et drue, toujours autour des 3800m d'altitude, flanquée de part et d’autre de reliefs tantôt arrondis tantôt découpés en formes bizarrement érodées type
Monument Valley, exhibant parfois des teintes beiges-roses dignes de pâtisseries tunisiennes ! Sans oublier, ici et là, quelques euphorbes candélabres, de plus en plus nombreux sur les pentes, pointées comme des doigts victorieux vers le ciel uniformément
bleu.
La chance a fait que nos places sont à droite donc regardant plein ouest tout au long de cette matinée de voyage vers le sud. Mais nous circulons maintenant dans une gorge encaissée le long du lit parfaitement sec d’un rio pluvial : quel
exploit de poser des rails dans cette rocaille tournicotante ! D'après l'altimètre du téléphone nous sommes descendus à 3300m. Mais le train se comporte un peu comme un bus, s'arrêtant plusieurs fois entre les arrêts officiels pour desservir de petits hameaux
sans aucun autre moyen de communication. La vallée s'élargit, nous continuons de descendre et Tupiza (2950m) ne doit plus être très loin. Maintenant, de chaque côté de la vallée, ce sont des montagnes brun-rouge foncé, auxquelles une très forte érosion donne
l’allure de murailles et de forteresses imprenables.
9h20, nous repartons de Tupiza, normalement pour 3 heures… D'abord en continuant à emprunter la même vallée aride, escarpée et pourtant si colorée, avec ses fantastiques forteresses imprenables… en photo depuis le train. Rattrapage peut-être
dans la Quebrada de Humahuaca demain ou après-demain ?
Nous sortons de la vallée : peut-être notre loco pourrait-elle, à l’occasion de quelque ligne droite, essayer d’accrocher le 30 à l’heure ? Mmouais, vœu pieux car nous recommençons à monter… Arrivés, péniblement, à 3450m, l’altitude de
Villazon, le paysage redevient un peu plus conforme a l’altiplano, steppe aride, buissons d'épineux, à perte de vue sauf vers l’ouest où la Cordillère se profile.
Midi 20, arrivée à Villazon, enfin ! Passage de la frontière en vitesse, et nous voici en Argentine, c'est-à-dire à La Quiaca, une ville frontière, sale, moche, et bientôt battue par un vent froid. Et là, nous craquons : pas question de nous enfiler encore 3 ou 4 heures de bus après 10 heures de train et une nuit réduite à sa plus simple expression. Donc nous prenons le 1er hôtel venu, et… à demain !